Embarqué avec les Ambulanciers
09/06/2020

Découvrez le récit d'Ugo Amez, Journaliste pour les Echos qui a suivi deux ambulanciers volontaires pour les interventions COVID19.
Fabien Sabatier et Jean-François Kyeffer, un équipage de Jussieu secours, sont volontaires. Depuis plusieurs semaines, ils ne réalisent plus que des « missions Covid », ces transports de patients atteints ou suspectés d’être infectés par le coronavirus. Ce sont des missions particulières qui répondent à des protocoles stricts, aussi bien pour les ambulanciers que pour les personnes qu’ils transportent. Ce vendredi 10 avril, alors que la plupart des Français occupent leur 25e jour de confinement, les deux hommes enfilent leur « kit Covid ». Une combinaison intégrale blanche. Les jambes, toujours, le buste puis la capuche. Le masque, toujours, puis les lunettes et enfin les gants. Fabien et Jean-François s’assurent que la tenue de l’autre est correctement enfilée. Ils ouvrent le hayon du véhicule, une odeur de javel s’échappe.
C’est par l’arrière d’un bâtiment du centre hospitalier Haut-Lévêque, à Pessac (33), qu’ils entrent dans les couloirs dédiés aux cas « Covid » en poussant le brancard vide. La mission : récupérer un homme pas encore testé « mais à forte probabilité de Covid » qui vient de passer une IRM. Après plusieurs dizaines de mètres dans les entrailles de l’établissement, un marquage au sol : « Stop ».
« On vient chercher Monsieur X », lance Fabien Sabatier, l’ambulancier le plus expérimenté de l’équipage. Sans s’approcher, une soignante l’oriente. L’homme attend, impassible. Il fixe des yeux les deux hommes en tenue de cosmonautes qui le prennent en charge pour le raccompagner à sa chambre d’hôpital dans un autre bâtiment. Monsieur X n’a pas besoin d’oxygène, il est également capable de se lever pour s’asseoir sur le brancard. Les gestes des équipiers son millimétrés, les deux hommes calculent chaque mouvement pour remonter le brancard et recouvrir le corps du patient d’un drap immaculé. Par le même dédale de couloirs, les voilà sur le parking où se trouve l’ambulance. Ils chargent le patient, Fabien Sabatier s’installe sur le siège à proximité pour les quelques minutes de voyage. Dans le service où il est hospitalisé, une infirmière les jalouse : « vous êtes mieux équipés que nous »…
De retour devant l’ambulance, Fabien sort le pulvérisateur pour désinfecter le brancard et l’intérieur du véhicule pendant que Jean-François n’oublie pas d’astiquer les poignées. « Cela permet de gagner du temps et de l’efficacité sur la désinfection. Cela permet à la javel d’agir durant le trajet de retour vers la base. » Ils retirent méticuleusement leurs tenues et les jettent dans des poubelles dédiées.
La base de Jussieu secours, la première compagnie ambulancière de France, est située à Canéjan et il ne faut que quelques minutes pour la rejoindre. Là, les équipiers désinfectent une seconde fois leur véhicule et leur brancard. À peine le temps de souffler qu’une nouvelle mission s’affiche sur le téléphone. Direction le Pôle santé d’Arcachon à La Teste-de-Buch. Un vendredi de week-end de Pâques et alors que le thermomètre affiche 27° au soleil, l’axe devrait être saturé, il n’en est rien.
Une fois arrivé, le même rituel pour se protéger de la contamination se met en place. Fabien Sabatier ouvre la voie, Jean-François Kyeffer pousse le brancard dans cette unité pédiatrique transformée pour accueillir des malades Covid. Au mur : des affiches « En grève ». Monsieur Y est âgé et a besoin d’oxygène pour respirer. S’il est transféré à Haut-Lévèque, c’est certainement car son état empire. « Je peux aller pisser avant d’y aller ? », demande-t-il. « Bien sûr ». Une fois installé sur le brancard, il s’inquiète : « Mon dossier, il me faut mon dossier. » « Je l’ai pris », répond Jean-François. En sortant, une infirmière du service rassure le vieil homme une nouvelle fois : « J’ai tout mis dans l’enveloppe ».
Arrivée dans un service Covid de l’hôpital Pessacais du CHU de Bordeaux : le parcours est également défini précisément. Signe d’une forte activité, les ambulanciers se croisent et en profitent pour échanger des tuyaux : « les clés de l’ambulance, tu les mets où quand tu es en tenue Covid ? Moi c’est dans la chaussure, mais c’est galère. »
Monsieur Y est installé dans sa chambre, soutenu par les deux équipiers. Les soignantes du service veillent à ce qu’ils respectent le protocole en enlevant leur sur-blouse.
Les sourires se devinent sous les masques alors que les deux hommes prennent la direction du véhicule à désinfecter un nouvelle fois. « Cette crise a changé les comportements dans le milieu médical, commente Fabien Sabatier. On est tous dans la même galère, alors on se serre plus les coudes. C’est bien. »
Lien de l'article : http://echo-ouest.fr/cf40_0/embarque-avec-les-ambulanciers/
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